Pêle-mêle cultur’elle n° 3
A défaut des odeurs et des saveurs, les photographies de Jean-François Mallet attisent la vue du lecteur dans une débauche de couleurs qui fait plaisir. Mais le photographe ne se contente pas de plonger son objectif dans l’assiette pour faire défiler un catalogue de la street food mondiale. Ici, en Crimée, dans cette paillote au bord de la mer Noire, il nous fait prendre place au côté de baigneurs attendant le bortsch et la salade de chou. Là, c’est la confection des nouilles dans une échoppe de Shanghaï qui appelle notre attention. Ici encore, sur une plage de la région de São Paulo, c’est le charriot d’un vendeur de noix de coco qui intéresse l’objectif du photographe. Car plus encore que le produit fini, la nourriture de rue met en scène la préparation et la vente de l’aliment. Qu’est-ce que ce kebab beyrouthin sans la broche sur laquelle il tourne ? Qu’est-ce que la nourriture de la place Jemaa el-Fna de Marrakech sans le bruit, la fumée et les odeurs qui lui sont associées ? La cuisine de rue est une nourriture qui se mange vite, certes, mais c’est aussi une nourriture qui se voit. Les photos de Jean-François Mallet ne sont pas de l’art pour l’art. Elles intègrent à chaque page l’homme, qu’il soit cuisinier ou mangeur, promeneur ou commerçant.
Deuxième affirmation à nuancer. Nous n’assistons pas à une standardisation ou à une uniformisation des habitudes alimentaires. Si des plats ou des produits connaissent un succès planétaire, les régimes culinaires présentent toujours des différences, des variations, des adaptations selon les régions. A travers les quelques 500 photos de son livre photo, Jean-François montre au contraire que la street food est l’expression d’identités culturelles fortes.
Véritable somme visuelle de la cuisine de rue, le Take Away de Jean-François Mallet ouvre des perspectives de recherche intéressantes dans le domaine de l’alimentation. Il y a à voir, à boire et à manger dans ce livre.